Royal Kinder Garden restitue, de manière non exhaustive, l’univers de notre travail de médiation que nous souhaitons porteur, éclairé et enthousiaste. Enfants et adultes peuvent rejouer en ligne ces expériences de l’œil, de la main et de la parole.
Royal Kinder Garden invite Boris Achour à créer de nouvelles formes à partir des projets emblématiques du Bureau des publics comme les émissions Rad’Arts, réalisées dans les expositions et diffusées sur Radio-Cartable, les ateliers de pratique artistique ou encore la collection de livrets-posters Exo. Enfants et adultes peuvent s’approprier cette matière vivante et rejouer en ligne ces expériences de l’oeil, de la main et de la parole.
Cette septième édition de Royal Garden propose une ascension qui se déplie au gré de documents, de jeux et d’expériences de médiation multiples. En toile de fond, la grille évoque les principes des jeux éducatifs de Friedrich Fröbel (1782-1852), pédagogue allemand à l’origine du concept de jardin d’enfants (Kindergarten). Cette grille était aussi l’un des motifs centraux de l’exposition Une exposition comme les autres d’Aurélien Froment (2011), qui proposait au public d’activer ces jeux réédités, réunis dans une boîte posée sur une table (Formes de la nature, formes de la connaissance, formes de beauté, 2011). D’après cette œuvre, l’équipe du Bureau des publics du Crédac avait créé « l’Atelier Kiosque », un atelier de pratique artistique basé sur l’appréhension de la géométrie et de l’architecture. Ce dernier s’appuyait sur la visite du Kiosque Raspail de Renée Gailhoustet (née en 1929) dans le centre-ville d’Ivry-sur-Seine et sur un travail de construction en volume. Archives photographiques, extraits sonores, traces d’ateliers et images s’agencent dans Royal Kinder Garden sur un quadrillage légèrement déréglé et racontent ces relations qui se tissent entre les artistes, les médiateurs et les jeunes visiteurs.
La salle du Bureau des publics, attenante à l’accueil du Crédac et aux salles d’exposition, est un lieu d’échange, d’apprentissage, de partage entre médiateurs et élèves, entre parents et enfants. Pendant les ateliers, d’autres « règles » s’appliquent : notre manière de faire se veut complémentaire du travail pédagogique assuré par les animateurs et enseignants. Repensés pour chaque exposition, les outils créés par les médiateurs et médiatrices du Bureau des publics sont pluriels : visites commentées, Ateliers-Goûtés pour les familles, dossiers de réflexion, ateliers de pratique artistique, projets avec des plasticiens invités en résidence dans des classes ou centres de loisirs. Le cadre, précis et souple, est propice à la tentative et aux expériences. Notre travail de transmission repose sur différents principes : être au contact des œuvres, manipuler des matériaux, explorer les formes élémentaires de la modernité, expérimenter des techniques nouvelles, partager des connaissances et des interrogations. Considérés comme des moteurs, les balbutiements participent au processus, tout comme ce qui advient de manière inattendue.
Chaque atelier de pratique artistique débute par une discussion basée sur les souvenirs de l’exposition vue en amont. Dans cette phase de restitution « mentale », orchestrée par les enfants qui, pour certains, côtoient le Crédac régulièrement depuis leur plus jeune âge, des décalages se produisent parfois et font se mélanger titres d’exposition, titres des œuvres et noms des artistes. Dans Royal Kinder Garden, ces distorsions de la mémoire produisent des situations nouvelles et trouvent un écho dans le générateur de titres d’exposition et le memory.
L’un des projets phares présenté dans Royal Kinder Garden, témoigne de notre approche héritée du dynamisme culturel des années 1980 qui voient les radios libres et les centres d’art émerger sur l’ensemble du territoire. C’est dans ce contexte porteur que naît Radio-Cartable en 1984 à Ivry, un an avant la création de l’association du Crédac. Grâce à un don de matériel d’un parent d’élève à l’école Maurice Thorez et à un suivi pédagogique et technique spécifique assuré par un enseignant, Radio-Cartable commence à émettre sur les ondes de Radio-Libertaire et s’adresse depuis à l’ensemble des élèves ivryens. Endossant tour à tour le rôle d’animateurs et d’auditeurs, ceux-ci bénéficient de cet outil singulier en réalisant interviews et reportages sur des sujets variés. Tout en stimulant la pratique du français, à l’écrit comme à l’oral, ce projet sensibilise ces jeunes publics au fonctionnement des médias. Entre 2012 et 2015, nous avons travaillé en partenariat avec l’enseignant-référent de Radio-Cartable et créé l’émission Rad’Arts, dont un florilège d’extraits est disponible à l’écoute.
Dans Conte de feu de camp présenté dans l’exposition Séances de Boris Achour au Crédac en 2012, Jean-Yves Jouannais incarne un conteur assis dans un cercle d’enfants. Ils sont dans l’obscurité, éclairés par un feu de camp sculptural et lumineux (Feu de camp pyramide, 2009), dans un environnement brut. Sur une succession d’images fixes, la voix-off du critique d’art conte une histoire, témoignage d’un enfant devenu adulte ayant connu la lumière et sa disparition, et concluant ainsi son récit : « Peut-être que vous pourrez retrouver la lumière. Peut-être que vous le pouvez, tout de suite ». À l’image des rites de transmission collectifs mis en place par l’artiste dans plusieurs films et installations, cette œuvre met en exergue une relation sensible et primitive entre les individus. La multiplicité des champs investis par Boris Achour (danse, cinéma, bande-dessinée, son, écriture…) qui renouvelle sans cesse le format de l’exposition fait écho à la diversité des sujets et des médiums explorés dans nos activités. Dans son travail, il est question du jeu, du détournement des règles, de la manipulation de formes élémentaires, ou encore de l’interaction entre les êtres et les œuvres. Invité à s’approprier la matière vivante du Bureau des publics, il conçoit une proposition inédite qui se développe à travers des GIF animés et une interface ludique qui sillonne des motifs et archives emblématiques.